Traque aux pratiques innovantes pour contrôler les adventices en Agriculture Biologique
Alexandre Tricheur*, Raymond Reau**, Jean-Philippe Choisis***, Jean-Marc Meynard****
*UE DSLP, INRAE, F-17450 Saint-Laurent-de-la-Prée, France
**UMR Agronomie, INRAE, AgroParisTech, Université Paris-Saclay, F-78850 Thiverval-Grignon, France
***CIRAD, INRAE, Montpellier SupAgro, SELMET, F-34000, Montpellier, France
****UMR SAD-APT, INRAE, AgroParisTech, Université Paris-Saclay, F-78850 Thiverval-Grignon, France
Email contact auteurs : alexandre.tricheur@inrae.fr, raymond.reau@inrae.fr, jean-philippe.choisis@inrae.fr, jean-marc.meynard@inrae.fr
Résumé
L’agriculture biologique (AB) est souvent présentée comme un prototype d’agriculture durable. L’un des freins majeurs au développement des grandes cultures en AB est la maîtrise des adventices, et la lutte mécanique se substitue souvent à la lutte chimique. Très consommatrice en énergies fossiles comme le pétrole, cette technique culturale contribue au réchauffement climatique. Dans un contexte où le nombre de jours disponibles pour intervenir mécaniquement contre les adventices est limité, quelles logiques d’action explorent les agriculteurs ? Dans le cadre d’une démarche de traque aux pratiques innovantes, dix exploitations en AB ont été enquêtées. La description de leurs pratiques montre qu’elles conduisent à des consommations en carburant qui varient selon le niveau de tolérance aux adventices, et selon les cultures. Enfin, l’analyse des logiques d’action des agriculteurs a permis de mettre en évidence des logiques d’actions économes en carburant.
Mots-clés :Maîtrise des adventices, couverts végétaux, logiques d’action, consommation de carburant.
Summary
Organic agriculture (OA) is often presented as a prototype of sustainable agriculture. One of the major obstacles to the development of field crops in organic farming is the control of weeds, and chemical control is often substituted by mechanical control. This cultivation technique consumes a lot of fossil fuels such as oil and contributes to global warming. In a context where the number of days available to mechanically control weeds is limited, what solutions are farmers exploring? As part of a process of tracking down innovative practices, ten AB farms were surveyed. The description of the practices of farmers shows that they lead to fuel consumption that varies according to the level of weed tolerance and according to the crops. Finally, the analysis of the farmers' action logic allowed to highlight fuel-saving action logic.
Keywords:Weed control, plant cover, action logic, fuel consumption.
Introduction
Symboles de la modernisation de l’agriculture d’après-guerre, les produits phytosanitaires ont des effets aujourd’hui démontrés sur la santé des agriculteurs (Jas, 2010) et sur l’environnement (IPBES, 2016 ; Pietrzak et al., 2019 ; Roussary et al., 2013). En conséquence, il existe une forte volonté sociétale et politique visant la réduction à moyen terme et l’interdiction à long terme de ces produits phytosanitaires (Jacquet et al., 2019). Malgré les récentes actions soutenues par le gouvernement français (Plan Ambition Bio 2022, Plan de sortie du glyphosate 2022, Plan Ecophyto 2018), l’utilisation de produits phytosanitaires dans l’agriculture française reste très élevée (Eurostat, 2020 ; FAOSTAT, 2020). Face à ce contexte politique et sociétal, l’agroécologie est promue par des acteurs de l’agriculture (politiques publiques, chercheurs, instituts techniques, collectifs d’agriculteurs). Ainsi de nombreux agriculteurs s’engagent dans une démarche de transition agroécologique dont l’agriculture biologique (AB) est une des voies. Considérée comme un prototype d’agriculture durable (Bellon et Penvern, 2014 ; Joannon et al.,2017), elle représente 9,5% de la surface agricole utile française en 2021, avec un accroissement annuel de 13% entre 2019 et 2021 (Agence bio, 2021). Elle a un effet positif sur l’abondance et la richesse spécifique de certains taxons tels que les oiseaux, les papillons, les coléoptères, les plantes et les microorganismes du sol (Fleury, 2011 ; Schneider et al.,2014). Les résultats sont cependant plus contrastés concernant la consommation d’énergies non renouvelables qui est en moyenne supérieure de 4% par tonne de céréales produite dans des fermes de polyculture-élevage en AB comparé à des fermes en agriculture conventionnelle (AC), mais inférieure de 54% lorsqu’elle est calculée par hectare cultivé. Les produits pétroliers représentent le principal poste de consommation d’énergie en AB (69%) tandis qu’en AC c’est l’utilisation d’engrais (47%) (Bochu et al., 2008 ; Sautereau et Benoit, 2016). L’un des freins majeurs au développement des grandes cultures en AB sont les adventices[1], en raison de leur impact négatif sur la récolte (en quantité et en qualité), et dont leur maîtrise conduit souvent à un travail du sol intensif (Colomb et al., 2009 ; Frottier et al., 2018) avec notamment le désherbage mécanique en substitution des herbicides (Adeux et al., 2019 ; Mohler et al., 2018 ; Yvoz et al., 2020). Mobiliser des techniques pour contrôler les adventices autres que la lutte mécanique, très consommatrice de produits pétroliers et qui peut avoir des conséquences négatives sur la structure et la biodiversité du sol (Labreuche et al., 2014), représente un axe de recherche majeur dans les systèmes de culture en AB. L’article propose dans un premier temps de se concentrer sur le cas d’un agriculteur innovant dans une logique de minimisation du travail du sol pour maîtriser les adventices. Dans un second temps nous analysons les logiques d’action de 9 autres agriculteurs en AB. Enfin, nous évaluons la consommation en carburant des différentes stratégies mises en œuvre pour maîtriser les adventices.
Matériel et méthodes
La démarche de traque aux pratiques innovantes
L’étude s’est déroulée en France entre 2018 et 2019 sur les marais rétro-littoraux de la façade atlantique (Vendée et Charente-Maritime), caractérisés par des sols très argileux (30-60%). Ces marais sont occupés principalement par des prairies naturelles pâturées ou fauchées, et en partie par des cultures assolées dans des parcelles aménagées avec un drainage aérien ou souterrain (Coutelle, 2016) : entre 16 000 et 20 000 ha sur 80 000 ha pour les marais charentais. Sur les surfaces drainées, le modèle d’agriculture dominant est un système de grandes cultures basé sur une utilisation d’herbicides pour réguler la flore adventice. La démarche de traque aux pratiques innovantes (Figure 1) décrite par Salembier et al. (2021) a été mobilisée avec pour objectifs d’identifier et d’évaluer les stratégies alternatives sans herbicides de maîtrise des adventices, d’y analyser la place de la lutte mécanique dans ces sols argileux où la faiblesse du nombre de jours disponibles contraint les possibilités comme la réussite des interventions. Aussi, nous faisons l’hypothèse que les agriculteurs en agriculture biologique mobilisent une combinaison de techniques de maîtrise des adventices, où la lutte mécanique n’est pas systématiquement dominante.
Caractériser et analyser les logiques d’action des agriculteurs
En recueillant les résultats attendus et les motivations de l’agriculteur (pour quoi le fait-il ?) et en décrivant ses pratiques de maîtrise des adventices (comment il le fait ?) nous sommes en mesure d’analyser ses logiques d’action (Reau et al., 2016). Les résultats attendus renvoient à la notion de « pour quoi agit-il ? ». Ces résultats, qui traduisent ses indicateurs personnels et leurs seuils de satisfaction, permettent d’évaluer, chaque année, l’efficacité de ses pratiques en mesurant les écarts entre résultats obtenus et attendus. Les pratiques renvoient quant à elles à la notion de « comment agit-il ? ». La logique d’action représente l’ensemble des pratiques mobilisées pour atteindre les résultats attendus par l’agriculteur. Dans l’objectif de décrire ces logiques, notre étude s’appuie sur deux méthodes pour (i) caractériser les résultats attendus par les agriculteurs, selon le type de flore adventice et (ii) caractériser les logiques d’action des agriculteurs pour réguler la flore adventice.
Caractériser les attendus de maîtrise des adventices des agriculteurs
La première méthode mobilise le référentiel dégâts-dommages-pertes (De, Do, Pe) conceptualisé par Zadok (1985) et repris dans les travaux d’Attoumani-Ronceux et al. (2011). La Figure 2 montre les relations entre ces trois catégories décrites par Savary (1991). Les adventices sont en compétition avec la culture dont elles gênent la croissance, dégâts pouvant entraîner des dommages de récolte (pertes de rendement, altération de la qualité), qui peuvent, à leur tour, entraîner des pertes économiques pour l’agriculteur.
Ainsi nous distinguons trois grandes catégories de résultats attendus :
- « pas de dégâts » (De) : l’agriculteur cherche ici à avoir des champs « sans enherbement » c’est-à-dire sans adventice visible au cours de la culture,
- « pas de dommages de récolte » (Do) : l’agriculteur tolère un certain enherbement, sans accepter de dommages de récolte pour la culture concernée, ni en quantité (objectif de rendements élevés), ni en qualité,
- « pas de pertes économiques » (Pe) : l’agriculteur tolère un certain enherbement, comme des dommages de récolte, sans accepter des pertes économiques dues aux adventices pour la culture concernée.
Caractériser l’usage d’une technique de lutte contre les adventices
Les 2 grands styles de rapport au changement décrits par Lemery et al.(2005) en élevage bovin allaitant, qui sont « Agir sur » et « Faire avec », sont également mobilisables pour catégoriser les actions de maîtrise des adventices. Nous avons décomposé le type « Agir sur » en « Agir systématiquement » et « Agir seulement si ». Les logiques de type « Agir systématiquement » sont basées sur une mobilisation systématique de la lutte mécanique en question. Celles de type « Agir seulement si » sont basées sur le principe de lutte raisonnée, par exemple en intervenant « à vue », seulement au-dessus d’un seuil d’adventices observées. Pour le type « Faire avec » les adventices, la lutte mécanique n’est pas mobilisée la logique « fait l’impasse », alors que l’enherbement est jugé important par les tenants de la lutte raisonnée.
Description des logiques d’action des agriculteurs et analyse de la consommation en carburant
Les logiques de maîtrise des adventices faisant appel à plusieurs pratiques mobilisées à des périodes différentes, nous avons choisi de décrire les logiques d’action à l’échelle du système de culture. Nous avons mobilisé, le schéma « décisionnel » (Reau et al., 2016) afin de caractériser la combinaison de pratiques mobilisée pour satisfaire les résultats attendus de l’agriculteur. Pour chaque agriculteur le système de culture a été caractérisé en identifiant, dans un premier temps, la succession de cultures ou rotation pratiquée. Puis pour chaque culture nous avons identifié l’ensemble des interventions mécaniques et pratiques en lien avec la gestion des adventices.
Chaque agriculteur peut avoir des résultats attendus et donc une logique différente, en fonction de la culture et du cortège floristique qui lui est associé, nous avons donc décomposé la logique d’action en trois « sous-logiques ». Ainsi, nous identifions, pour chaque exploitant, une sous-logique, ciblant les adventices annuelles automnales (cultures d’hiver), les adventices annuelles estivales (cultures de printemps) et les adventices vivaces (toutes cultures). Pour chaque agriculteur et pour chaque sous-logique nous avons affecté un niveau d’attendu (dégâts = 0, dommages de récolte = 5 ou pertes économiques = 10) et un type de raisonnement (Agir systématiquement = 0, agir seulement si = 5 et faire avec = 10). Cette décomposition nous a permis d’identifier 4 groupes d’agriculteurs (Tableau 1) dont leurs attentes et leurs types de raisonnements se rapprochent.
Les données des entretiens ont permis d’identifier, pour chaque agriculteur, la succession des cultures, l’ensemble des opérations de travail du sol et de récolte réalisées dans le système de culture. Les entretiens ne précisant pas les interventions d’épandage, les chiffres que nous présentons n’incluent pas les opérations de fertilisation. Pour les consommations de carburant, nous nous sommes appuyés sur le référentiel de coûts des opérations culturales 2020 édité par les chambres d’agriculture (Walter et al., 2020). Ainsi pour chaque intervention et en fonction de la nature et des caractéristiques techniques de l’outil nous avons affecté une valeur de consommation de carburant en litre/hectare (L/ha) nous permettant d’analyser et de comparer les consommations en carburant des différents systèmes de culture.
Résultats
Cas d’un agriculteur innovant basant sa stratégie sur la couverture permanente du sol
Le système de culture de l’agriculteur 7 repose sur plusieurs principes : absence de retournement du sol, faible perturbation du sol (pour préserver la structure du sol et la matière organique), couverture du sol systématique (vivante ou morte), rotation longue et diversifiée (Figure 3) pour assurer une ressource mellifère pour les abeilles. Associant des cultures annuelles avec des cultures pluriannuelles, il base son système sur l’association d’espèces cultivées et la couverture permanente du sol. Les cultures et associations d’espèces sont choisies en fonction de 4 objectifs : (i) l’alimentation azotée (choix de légumineuses pour enrichir le sol en azote par exemple) (ii) la richesse en nectar utilisé par les abeilles pour élaborer le miel (choix de la phacélie comme plante de couverture) (iii) la facilité de tri de la récolte[2] (trèfle et blé mélangé se trient facilement), et (iv) la maîtrise des adventices (choix d’une espèce couvrante, le trèfle, en association avec une céréale d’hiver). L’agriculteur cherche à obtenir une récolte avec peu d’impuretés, et de graines d’adventices en particulier. Suivant le nombre de sacs de déchets par rapport au volume trié, l’agriculteur estime la quantité de plantes adventices arrivées à maturité, constituant un critère d’évaluation du niveau de maîtrise de la flore spontanée. La rotation longue avec alternance de cultures d’hiver et de printemps (Figure 3) contribue à empêcher la levée des adventices en perturbant leur cycle et en limitant la prédominance d’une flore spécifique.
La logique d’action contre les adventices annuelles automnales (figure 4)
Pour la flore annuelle automnale, les deux espèces adventices ciblées par l’agriculteur, dans les cultures d’hiver, sont la folle avoine (Avena fatua) et la ravenelle (Raphanus raphanistrum). La graine de folle avoine étant difficile à trier avec du blé, l’exploitant cherche à obtenir une récolte la plus « propre » possible. Pour la folle avoine il tolère donc sa présence, mais n’exige aucun dommage de récolte. Pour la ravenelle, qui est très compétitive sur céréale d’hiver, il est très exigeant et ne tolère pas de dégâts, au point d’intervenir manuellement. Dans la culture sensible, la céréale d’hiver, l’objectif est dans un premier temps de ne pas avoir de levée de folle avoine et ravenelle. Pour cela il ne travaille pas le sol en profondeur pour ne pas remonter de graines viables. Ensuite, si l’humidité de la terre est favorable à une levée spontanée, il réalise un faux semis avant d’implanter du blé tendre d’hiver afin de réduire les germinations susceptibles de se produire en même temps que le blé. Enfin, le semis tardif (en novembre) vise à esquiver les dates de levées préférentielles de la folle avoine et de la ravenelle. L’autre stratégie est de favoriser la compétition. Elle se caractérise par une densité de semis de la céréale d’hiver élevée (350 grains par mètre carré) et par le choix d’une céréale couvrante (Blé ou grand épeautre) conduite en association avec une plante de service[3], le trèfle d’Alexandrie. Semée en même temps que le blé tendre d’hiver, cette espèce aura également un rôle de compétition sur la folle avoine et la ravenelle et de nutrition azotée pour la culture suivante, le colza. Aucune intervention n’est ensuite réalisée jusqu’au printemps. Au printemps, si une présence trop importante de ravenelle est constatée, l’agriculteur les arrachera manuellement. Si la folle avoine est présente dans la céréale d’hiver, un écimage est effectué afin d’éviter la montée à graines et un trop grand « salissement » de la récolte.
Dans les cultures, « non sensibles » (tournesol, sarrasin et couverts végétaux), la couverture systématique du sol durant la période d’interculture d’hiver (d’octobre à avril) vise à favoriser la compétition sur la folle avoine ou la ravenelle. Afin d’éviter la montée à graine, un écimage est systématiquement réalisé avant destruction du couvert. La phacélie est la plante choisie par l’agriculteur pour couvrir les périodes d’interculture, très couvrante et avec une croissance rapide elle est très compétitive vis-à-vis des adventices. De plus, elle constitue une ressource mellifère pour les insectes pollinisateurs, critère important pour l’agriculteur qui est aussi apiculteur.
La logique d’action contre les adventices annuelles estivales (figure 5)
Les espèces annuelles estivales cibles sont le chénopode (Chenopodium album) et la folle avoine (Avena fatua). L’agriculteur tolère la présence de ces adventices, mais n’exige aucun dommage sur la récolte de l’année comme sur les récoltes des années à venir. Pour la folle avoine l’objectif est de ne pas avoir de plantes montées à graine au moment de la récolte. Pour le chénopode c’est de ne pas avoir d’individus dans l’inter-rang de la culture de printemps. Pour empêcher leur levée, il évite les dates de levées préférentielles en semant tardivement (fin avril pour le tournesol et début juin pour le sarrasin) et ne travaille pas le sol pour éviter la remontée de graines viables. La culture de printemps est semée au strip-till après roulage du couvert végétal pour le détruire si c’est de la phacélie ou est semé dans le couvert vivant si c’est du trèfle. En couvrant le sol, le mulch vise à limiter la levée des adventices et à conserver une humidité en surface pour permettre une levée rapide de la culture. Semé à haute densité et avec un inter-rang de 50 cm, le tournesol a une couverture du sol plus grande et est plus compétitif. Pour contrôler la flore spontanée, l’agriculteur passera un rouleau hacheur dans l’inter-rang. L’implantation du tournesol dans un mulch ou un couvert vivant est un défi technique pour l’agriculteur, car il se traduit souvent par un échec (couvert qui se salit, compétition du couvert sur le tournesol). Ainsi l’année où nous avons enquêté l’agriculteur 7, la présence d’adventices dans le trèfle était trop importante pour lui, il a donc décidé de détruire le couvert pour faire des faux-semis avant l’implantation de tournesol et fait le choix de biner sa culture. Pour le sarrasin, l’inter-rang étant trop faible, il mise sur son pouvoir allélopathique[4]. Semé plus tardivement, fin mai-début juin, que le tournesol, il permet de réaliser des faux semis entre la destruction du couvert végétal et l’implantation du sarrasin.
La logique d’action adventices vivaces (figure 6)
Les deux espèces vivaces ciblées sont le rumex (Rumex obtusifolius, Rumex crispus) et le chardon (Cirsium arvense). Pour chacune d’entre elles, l’exigence est élevée et aucun dégât n’est toléré. Pour empêcher leur levée dans les cultures de printemps, la technique du faux semis est utilisée pendant les périodes d’interculture entre une culture de printemps et d’hiver, avant un sarrasin ou avant un couvert végétal. Un outil de déchaumage superficiel (à moins de 5 cm de profondeur) avec patte d’oie est passé dans l’objectif de scalper le rumex entre le collet[5] et les racines (deux passages). Équipé d’un rouleau à dents gaufrées à l’arrière, le déchaumeur (un cultivateur canadien) permet de remonter les racines de rumex et les drageons de chardon à la surface du sol. Après cette étape, une intervention manuelle est réalisée pour bien exposer les racines à l’air libre et éviter qu’elles ne repiquent. À l’automne suivant, plusieurs options sont envisagées, (i) une céréale d’hiver en association avec du trèfle est implantée (ii) un sarrasin est semé au printemps pour réaliser des faux semis pendant la période d’interculture précédente (iii) une phacélie est implantée à l’automne dans l’objectif d’exercer une forte compétition sur les rumex et chardons. L’agriculteur n’hésite pas à arracher manuellement les individus dès qu’il en observe dans les cultures ou les couverts végétaux.
Pour assurer la durabilité de son système de culture, l’agriculteur a dans un premier temps réfléchi à la mise en place d’une rotation longue de 8 ans avec l’alternance de deux cultures de printemps et deux cultures d’hiver. La maîtrise des adventices est également assurée par l’alternance de cultures couvrantes et de cultures désherbées mécaniquement. Une grande partie de sa stratégie est basée sur les mécanismes de compétition (densité de semis, faible inter-rang, espèce couvrante, association d’espèces et espèces allélopathiques) dans la culture principale et pendant les périodes d’incultures avec les couverts végétaux. Les faux semis, les roulages, les écimages et les binages représentent finalement une base importante de sa logique d’action. Malgré la volonté de l’agriculteur de couvrir son sol en permanence la part des interventions mécaniques reste importante, 50 passages au total sur l’ensemble de la rotation (récolte et destruction des couverts compris) soit 6,25 passages en moyenne par année. L’agriculteur réalise, en moyenne, 4 interventions mécaniques par culture d’automne et de printemps et 3 interventions pour un couvert végétal. Les couverts végétaux et permanents ouvrent des pistes intéressantes en termes de maîtrise des adventices et de réduction du nombre d’interventions mécaniques. Néanmoins l’analyse des logiques d’actions de l’agriculteur 7 montre que cela représente un défi technique et agronomique pour réussir les couverts végétaux chaque année. Malgré l’introduction de couverts végétaux, les interventions mécaniques représentent une part importante dans la gestion des adventices.
Les figures 4, 5 et 6 représentent les logiques d’action de l’agriculteur sur les adventices annuelles automnales, annuelles estivales et vivaces. Pour chaque logique, on distingue les pratiques (encadrés gris) qui visent une maîtrise de la flore spontanée dans les cultures considérées comme sensibles versus les autres cultures. La culture est dite sensible quand les adventices ciblées sont susceptibles d’apparaître et de rentrer en compétition directe avec elle. Dans l’objectif d’atteindre les résultats (encadrés bleus) sur les adventices cibles, l’agriculteur cherche à atteindre des états intermédiaires dans un ordre chronologique. Ainsi pour « empêcher la levée » l’agriculteur vise une levée, d’adventices cibles, nulle à faible, pour « détruire », avoir des plantules et plantes détruites après la levée, pour « renforcer la compétition culture-adventice » avoir peu de plantes adventices au stade végétatif et pour « limiter le ré-ensemencement » avoir peu ou pas d’adventices au stade de maturité dans son champ.
Les logiques d’action des agriculteurs pour maîtriser les adventices
À travers une typologie construite selon deux variables (le type de raisonnement et le type de résultat attendu) affectées aux trois types de flores adventices, automnales, estivales et vivaces, nous identifions 4 catégories de logiques d’action (Tableau 1). Nous avons volontairement isolé l’agriculteur 7 pour analyser en profondeur son système de culture (partie « Cas d’un agriculteur innovant basant sa stratégie sur la couverture permanente du sol »), mais il pourrait aussi faire partie du groupe 2. Dans la suite de l’analyse, les interventions mécaniques correspondent aux labours, aux faux semis, aux déchaumages, aux désherbages mécaniques et à l’écimage.
Groupe 1
L’agriculteur 2 souhaite peu de dégâts d’adventices d’automne et estivales et peu de dommages dus à la présence de vivaces. L’agriculteur 3 souhaite peu de dégâts d’adventices estivales et vivaces et peu de dommages d’adventices automnales. Tous deux raisonnent la gestion des adventices par l’utilisation systématique d’outils mécaniques (Tableau 1). Ils utilisent les périodes d’interculture pour intervenir mécaniquement contre les adventices (faux-semis et déchaumages). La base de leur logique d’action réside dans une rotation longue avec alternance de cultures d’automne et de printemps (Tableau 2). Débuter la rotation par une culture fourragère longue à base de légumineuse vise une maîtrise efficace des adventices vivaces comme le rumex ou le chardon qui vont subir un épuisement de leurs réserves racinaires par des fauches ou pâturages successifs. À la destruction de cette culture fourragère, l’azote apporté par les légumineuses favorisera un démarrage rapide de la culture suivante qui est plus rapidement compétitive vis-à-vis des adventices. Sur cultures d’automne, la stratégie de maîtrise des adventices consiste à choisir des espèces cultivées compétitives (céréale), à semer tardivement (fin novembre) et à une densité élevée (400 grains/m2). Dans un second temps, les interventions mécaniques (entre 3 et 4 passages par culture) interviennent en prélevée (faux semis, déchaumage), post-levée (herse étrille, houe rotative) et parfois avant la récolte (écimage). Sur les cultures de printemps, la stratégie de maîtrise des adventices consiste à réaliser de nombreux faux semis (entre 4 et 7), à semer tardivement à une densité de semis élevée et à favoriser une levée de la culture très rapide (fertilisation, sol humide et réchauffé). Le désherbage mécanique intervient fréquemment (entre 1et 5 passages par culture) en post-levée (herse étrille), pendant le cycle végétatif (binage) et avant récolte (écimage).
L’agriculteur 2 implante un couvert végétal en semis direct entre une culture d’hiver et une culture de printemps (Tableau 2). Plusieurs espèces peuvent être implantées selon les conditions climatiques, le sorgho fourrager, le colza fourrager et un mélange avoine/vesce. L’objectif de ces couverts est double, d’une part ils visent à induire une compétition vis-à-vis des adventices durant la période d’interculture (action sur le long terme) et d’autre part, restitués au sol, ils visent à créer un mulch qui conserve une humidité de surface et fournira des éléments nutritifs à la culture suivante, permettant son implantation plus rapide (action sur le court terme). L’agriculteur 3 quant à lui ne réalise pas de couverts végétaux pendant les périodes d’intercultures. Étant sur sol argileux l’agriculteur a peur de ne pas pouvoir intervenir suffisamment tôt au printemps pour détruire le couvert végétal.
Groupe 2
Les agriculteurs 4 et 9 souhaitent peu de dommages d’adventices automnales dans leurs cultures, l’agriculteur 6 cherche à obtenir peu de dégâts, et l’agriculteur 10 ne réalise pas de cultures d’automne (Tableau 1). Pour la flore estivale, les agriculteurs 4, 6 et 10 cherchent à avoir peu de dégâts tandis que l’agriculteur 9 souhaite peu de dommages. Enfin, les agriculteurs 4 et 6 veulent peu de dommages de vivaces tandis que les agriculteurs 9 et 10 souhaitent peu de dégâts (Tableau 1). Pour les agriculteurs 4 et 6, la base de leurs logiques d’action réside dans une rotation longue avec alternance de cultures d’automne et de printemps (Tableau 2). Pour les deux autres agriculteurs du groupe, la rotation est courte (< 4 ans). 3 agriculteurs sur 4 débutent leur rotation par une culture fourragère longue à base de légumineuses pour une bonne maîtrise des adventices vivaces et un démarrage rapide de la culture suivante. Pour les cultures d’automne, une partie de la stratégie consiste à implanter des espèces couvrantes (avoine, seigle, grand épeautre) et à semer tardivement (fin novembre). Sur ces cultures, les agriculteurs 4, 6 et 9 mobilisent systématiquement les interventions mécaniques en pré-levée (labour pour les agriculteurs 6 et 9 puis entre 1 et 2 faux-semis/culture pour chaque agriculteur), en post-levée (1 passage de houe rotative, 1 passage de herse étrille et/ou un passage de bineuse/culture) et avant récolte (1 écimage/culture). Sur culture de printemps, le choix est essentiellement porté sur des cultures sarclées (Tournesol, Pois-chiche, Maïs) l’ensemble des agriculteurs mobilisent les outils mécaniques de manière systématique (entre 6 et 10 passages par culture en pré-levée (labour et faux-semis), en post-levée (herse étrille et houe rotative) et pendant le cycle végétatif (binage). L’agriculteur 10 se distingue en ne cultivant que des cultures de printemps (Tableau 2). Récemment passé en AB, il est très exigeant sur le contrôle des adventices et préfère implanter uniquement des cultures pouvant être désherbées mécaniquement de manière intensive (7 interventions par culture). La gestion des vivaces se fait mécaniquement par des faux-semis durant les périodes d’interculture et/ou par fauche/pâturage dans les cultures fourragères longues.
Pour les deux agriculteurs qui mobilisent les couverts végétaux (Tableau 2) l’objectif est de limiter la pression en adventices pendant la période d’interculture pour éviter d’intervenir mécaniquement et en introduisant des légumineuses dans le couvert, pour favoriser la vigueur de l’espèce cultivée de printemps. Les deux agriculteurs implantent, durant la période d’interculture, une céréale avec une légumineuse (féverole). Selon l’année, le couvert est soit détruit mécaniquement, soit pâturé par les animaux. Dans les deux cas, le couvert végétal contribue à enrichir le sol en matières organiques, mais dans le cas d’un pâturage, les animaux en transformant la matière végétale en déjections amélioreront la disponibilité de l’azote. Ainsi le pâturage en fournissant de l’azote facilement assimilable par les plantes, via les déjections, permet une croissance plus rapide de la culture suivante que dans le cas d’une destruction mécanique.
Groupe 3
Les agriculteurs 1 et 8 sont peu exigeants sur la flore automnale et visent peu de pertes économiques (Tableau 1). L’agriculteur 5, quant à lui, souhaite avoir peu de dommages. Pour la flore estivale, l’agriculteur 1 ne veut pas de dégâts dans la culture, l’agriculteur 8 souhaite obtenir peu de dommages et l’agriculteur 5 peu de pertes économiques. Pour l’ensemble d’entre eux, les logiques d’action se basent sur une rotation longue avec alternance de cultures d’automne et de printemps et par l’implantation d’une culture fourragère longue à base de légumineuse en tête de rotation (Tableau 2). À la différence des deux autres groupes, les outils mécaniques sont utilisés uniquement sur culture de printemps pour maîtriser les adventices. La flore annuelle automnale est contrôlée par une date de semis tardive (fin novembre), un choix de céréales couvrantes et de variétés anciennes populations[6] jugées plus adaptées, plus couvrantes (plusieurs variétés avec différentes caractéristiques morphologiques) et plus compétitives vis-à-vis des adventices (plante plus haute et port de feuille plus horizontale). En dehors d’un ou deux déchaumages avant le semis de la culture d’hiver, les outils mécaniques sont très peu utilisés (1 passage de déchaumage par culture). Pour contrôler la flore annuelle estivale, les variétés anciennes populations sont employées ainsi que les outils mécaniques (entre 5 et 7 passages par culture) sur cultures de printemps (labour, faux-semis, binage, herse étrille).
Pour l’agriculteur 1, qui introduit un mélange de céréales et de légumineuses entre deux maïs (Tableau 2), l’objectif est d’empêcher la levée d’adventices durant la période d’interculture en induisant une forte compétition. Par leur port et leur hauteur différente, les espèces du couvert végétal créent plusieurs étages de végétation qui induisent une forte compétition pour la lumière. Les différentes architectures racinaires viennent quant à elles induire une forte compétition pour la ressource en eau. La présence de légumineuses dans le couvert (fourniture d’azote) et la présence d’un mulch (maintien d’une humidité de surface) visant un démarrage rapide du maïs suivant qui sera plus rapidement compétitif. L’agriculteur 8 implante un fenugrec (Tableau 2) entre une culture d’hiver et un maïs. Le Fenugrec possède un bon développement en conditions chaudes. Sa levée rapide vise à obtenir une forte occupation du sol, ce qui le rend très compétitif vis-à-vis des adventices. En enrichissant le sol en azote capté dans l’atmosphère, il permet une croissance rapide du maïs qui prendra le dessus rapidement sur les adventices en refermant l’inter-rang.
Pour résumer, les deux agriculteurs du groupe 1 sont très exigeants en matière de maîtrise des adventices. Quelle que soit la flore adventice considérée (automnale, estivale, vivace), ils ne veulent pas de dégâts ni de dommages sur récolte. La lutte mécanique est systématiquement appliquée sur culture de printemps et d’automne (4 interventions mécaniques par culture en moyenne). Les 4 agriculteurs du groupe 2 sont aussi exigeants que ceux du groupe 1, mais l’utilisation des outils mécaniques pour maîtriser les adventices est plus systématique et fréquente (5 interventions mécaniques par culture en moyenne). Les 3 agriculteurs du groupe 3 sont plus tolérants aux adventices automnales et estivales ce qui se traduit par un nombre d’interventions mécaniques plus faible (2 interventions mécaniques par culture en moyenne). Ils visent un niveau minimal de marge brute tout en tolérant des dégâts et des dommages de récolte. En d’autres termes, les agriculteurs jugent le coût en carburant et/ou en temps pour intervenir mécaniquement trop important par rapport aux gains de rendement ou de qualité potentiels, ils préfèrent donc ne pas intervenir et tolérer la présence d’adventices dans leurs champs cultivés. L’agriculteur 7, dont les logiques d’action ont été présentées précédemment, est tout aussi exigeant que ceux du groupe 1, néanmoins l’utilisation des outils mécaniques reste plus faible que pour les groupes 1 et 2, mais plus élevée que pour le groupe 3 (3 interventions mécaniques par culture en moyenne). D’après l’analyse des logiques d’action, une relation semble exister entre le niveau de tolérance aux adventices et la fréquence de passage des outils mécaniques pour maîtriser les adventices (Figure 7). Plus l’agriculteur est exigeant et plus il semble mobiliser les outils mécaniques. Dans la partie suivante, nous analyserons la consommation en carburant de ces différents systèmes de culture.
[6] Une variété est un ensemble d’individus apparentés au sein d’une même espèce, formant une population artificielle utilisée pour une production agricole. Les variétés populations sont un type de variétés issues de la multiplication par pollinisation libre d’un ensemble d’individus.
La consommation en carburant des différentes logiques d’action pour maîtriser les adventices
Dans cette partie, nous nous sommes intéressés uniquement aux opérations mécaniques liées à la gestion des adventices. Nous prendrons en compte l’ensemble des interventions, de la préparation du lit de semence à la récolte. Seules les interventions liées à la fertilisation des cultures ne sont pas prises en compte, car non recueillies lors des entretiens. Pour comparer les exploitations, nous avons calculé la consommation en carburant (litre/hectare) moyenne par culture. Cet indicateur a été obtenu en calculant la consommation en carburant sur l’ensemble du système de culture divisée par la durée de la rotation (nombre d’années).
Sur la figure 8, nous observons que la consommation en carburant et sa variabilité entre groupes sont plus importantes sur culture de printemps. Quels que soient les groupes, les agriculteurs sont plus exigeants sur la flore estivale (Tableau 1). De plus, sur les cultures de printemps, le nombre de jours disponibles pour intervenir mécaniquement est plus élevé. Cela se traduit donc par des interventions mécaniques plus nombreuses sur culture de printemps que sur les autres types de culture (7 passages en moyenne par culture de printemps sur l’échantillon de 10 agriculteurs contre 3 passages en culture d’automne). Ainsi, la consommation totale en carburant est plus élevée sur culture de printemps (de 84 L/ha en moyenne pour l’ensemble des groupes contre 49 L/ha sur cultures d’automnes, 27 L/ha pour les couverts végétaux et 8 L/ha sur les cultures fourragères longues). Un autre élément explicatif réside dans le fait que les cultures de printemps sont souvent des cultures à plus forte valeur ajoutée. Les agriculteurs cherchent donc à obtenir une culture la plus « propre » possible pour maximiser le rendement et donc le chiffre d’affaires. En termes de raisonnement, la figure 8 montre que les agriculteurs qui mobilisent de manière raisonnée les interventions mécaniques (groupe 3 et 4) sont ceux qui ont une consommation totale par culture la plus faible (40 L/ha sur culture d’automne pour les groupes 3 et 4 contre 59 L/ha pour les groupes 1 et 2, 60 L/ha contre 107 L/ha sur culture de printemps, 20 L/ha contre 34 L/ha sur couverts végétaux). Il n’y a pas de différence significative sur les cultures fourragères longues. Nous avons vu, dans la partie précédente, que les agriculteurs des groupes 3 et 4 mobilisent davantage les processus de compétition et d’évitement, notamment sur cultures d’automne, que ceux des groupes 1 et 2, ce qui se traduit par une moindre utilisation des outils mécaniques pour gérer les adventices.
Après analyse des consommations en carburant moyennes par type de culture et par groupe, nous allons identifier les principales interventions mécaniques liées à la gestion des adventices. Dans la consommation totale, le déchaumage représente 37% de la consommation en carburant sur culture d’automne, 13% sur culture de printemps, 71% sur culture fourragère longue et 68% sur les couverts végétaux (tableau 3). Le deuxième poste de consommation est lié aux faux-semis qui représentent 22% de la consommation sur culture d’automne, 47% sur culture de printemps, 29% sur culture fourragère longue et 18% sur les couverts végétaux. Sur culture d’automne, l’écimage représente 12% de la consommation tandis que le labour ne représente que 8%. Sur culture de printemps, le binage correspond à 12% des interventions et le labour à 13%. Nous constatons ici que la technique du labour est finalement peu utilisée dans la gestion des adventices contrairement aux faux-semis et aux déchaumages.
Les résultats montrent une différence non significative de consommation entre les systèmes de culture qui mobilisent les couverts végétaux (53 L/ha en moyenne par culture) et ceux qui ne les mobilisent pas (60 L/ha en moyenne par culture). Étant donnée la faible taille de l’échantillon, nous ne pouvons pas conclure sur la contribution éventuelle des couverts végétaux à une économie en carburant dans les stratégies de maîtrise des adventices. Dans nos cas d’étude, les agriculteurs qui ne couvrent pas le sol durant les intercultures vont en moyenne réaliser 3 à 4 interventions de faux semis ou de déchaumages. À l’inverse, un agriculteur qui va implanter un couvert végétal durant cette même période d’interculture va réaliser une voire deux opérations de semis puis, dans certains cas, une ou deux interventions de déchaumage pour détruire le couvert végétal. Dans ces deux cas de figure, la consommation en carburant est similaire. D’après nos résultats les couverts végétaux ne semblent pas jouer un rôle important dans la réduction de la consommation en carburant du système de culture.
Néanmoins, nous observons dans notre échantillon des agriculteurs qui sont plus économes en carburant que d’autres (Figure 9). En moyenne, le groupe 3 a une consommation de 38 L/ha contre 54 L/ha pour le groupe 4, 59 L/ha pour le groupe 1 et 69 L/ha pour le groupe 2. Sachant que la présence de couverts végétaux n’induit pas une économie de carburant, d’autres facteurs permettent d’expliquer ces différences. Les agriculteurs du groupe 3 sont plus tolérants aux adventices que ceux des autres groupes (Tableau 1). Ils interviennent très peu à l’automne, un déchaumage suffit à préparer le lit de semence puis ils sèment et ils récoltent. La base de leur stratégie réside en un semis tardif pour esquiver les dates de semis et dans la mise en place d’espèces de céréales très couvrantes (variétés anciennes, seigle, grand épeautre, avoine). Ils ont également, comparativement aux autres, moins de cultures de printemps dans leur rotation. Or c’est la culture où le nombre d’interventions mécaniques est le plus élevé. D’autre part, ils mobilisent des cultures fourragères longues dans leurs rotations, cultures très peu consommatrices en carburant.
Discussion
Les connaissances acquises par l’analyse des logiques d’action
L’analyse des logiques d’action de l’agriculteur 7, qui mobilise de manière importante les couverts végétaux dans son système de culture, montre qu’il mobilise d’autres leviers pour gérer les adventices comme la lutte mécanique, le choix d’espèces cultivées couvrantes, l’association de cultures, les semis tardifs. Les couverts végétaux à eux seuls ne peuvent pas expliquer la réussite de la maîtrise des adventices même si leurs effets sur la biomasse adventice sont maintenant démontrés. Les logiques d’actions des 9 autres agriculteurs montrent que c’est l’enchaînement dans le temps de différentes pratiques qui permet, à l’échelle du système de culture, une bonne maîtrise des adventices selon les critères d’exigences des agriculteurs enquêtés. Ainsi, la rotation des cultures joue un rôle essentiel dans la maîtrise des adventices par l’alternance des dates de semis, mais également par l’alternance d’espèces désherbées mécaniquement ou couvrantes et d’espèces automnales ou estivales (Chauvel et al.,2018). Les couverts végétaux à base de légumineuse jouent néanmoins un rôle sur la fertilité du système de culture et leur restitution en azote permet un démarrage rapide de la culture suivante, attesté par les observations des agriculteurs, qui occupera rapidement l’espace disponible. L’intégration de cultures fourragères longues en début de rotation joue un rôle suppressif important sur les adventices notamment par leur forte compétitivité, mais également par les fauches et/ou les pâturages successifs qui empêchent les adventices de monter à graine et épuisent leurs réserves racinaires. Dans chacune des stratégies, la lutte mécanique joue un rôle important que ce soit avant l’implantation de la culture principale par des opérations de faux semis ou pendant le cycle de la culture par des interventions de herse étrille, houe rotative ou bineuse pour éliminer les adventices présentent.
L’analyse des consommations en carburant des différents systèmes de cultures ne fait pas apparaitre de lien entre la consommation en carburant et la présence ou non de couverts végétaux. En ce sens, le niveau de tolérance de l’agriculteur vis-à-vis de la flore adventice semble être plus en lien avec une consommation en carburant faible à l’échelle du système de culture. Nos résultats montrent que la consommation en carburant est très importante sur les cultures de printemps. En comparaison aux cultures d’automne (dont le prix de vente ne dépasse pas les 500 €/tonne) les cultures de printemps sont dites à forte valeur ajoutée. C’est-à-dire que leur prix de vente à la tonne est très élevé en Agriculture Biologique (en moyenne supérieur à 800 €/tonne). D’autre part, le potentiel de rendement des cultures de printemps est inférieur à celui des cultures d’automne. Toutes ces raisons font que l’agriculteur met tout en œuvre pour réussir ces cultures, il sera donc moins tolérant à la présence d’adventices dans les cultures et interviendra mécaniquement de manière plus systématique. L’agriculteur 7 a pour ambition d’arrêter le désherbage mécanique dans les cultures de printemps en semant directement la culture principale dans un couvert vivant de trèfle ou de luzerne. La couverture permanente des sols avec l’implantation de cultures de rentes dans des couverts vivants est une piste de recherche intéressante tant en termes d’économie de carburant que de maîtrise des adventices.
L’analyse des logiques d’action, une ressource pour la conception
En réponse à l’abandon des intrants de synthèse, l’AB mobilise le travail du sol en particulier en matière de maîtrise des adventices. Nos résultats montrent que les outils mécaniques sont essentiellement mobilisés sur les cultures de printemps, période durant laquelle le nombre de jours pour intervenir est plus élevé. La répétition, dans le temps de ces opérations de travail du sol a un coût en carburant et environnemental important (Fleury et al.,2014). De ce point de vue, l’étude que nous faisons de logiques d’actions d’agriculteurs économes en carburant (groupe 3 et 4), situés sur terres argileuses, fournit des résultats qui constituent une ressource pour la conception de logiques de maîtrise des adventices économes en carburant. « En donnant lieu à des anomalies créatives, la traque aux pratiques innovantes permet d'éclairer les impasses cognitives induites par le paradigme productiviste et favorise l'émergence d'approches alternatives de gestion des cultures ou d'organisation des exploitations agricoles » (Salembier et al.,2021, p.18). Originales, les logiques d’action identifiées lors de la traque aux pratiques innovantes constituent des supports heuristiques potentiels pour stimuler la créativité d’autres agriculteurs. De la même manière que l’ont expérimenté Berthet (2014) ; Reau et al.(2016) et Salembier (2019), nos résultats sont mobilisables dans un processus de conception innovante. Ils permettraient d’explorer des pistes en rupture et d’identifier les connaissances manquantes comme l’implantation de cultures de rente sous couvert permanent, poussant les participants à explorer, collectivement, des champs inconnus (Berthet et al., 2020). Par ailleurs, nos résultats fournissent des ressources agronomiques mobilisables pour la conception de systèmes sans-pesticides et peuvent ainsi contribuer au changement de paradigme nécessaire à la construction d’une nouvelle agriculture (Jacquet et al., 2022). Le partage des expériences d’agriculteurs en situation de réussite représente un moteur pour initier des démarches collectives de conception et d’adoption de pratiques innovantes (Bakker et al., 2021 ; Chantre et al., 2015) essentielles pour initier un processus de changement de système (Schoonhoven et Runhaar, 2018).
Conclusion
La démarche de traque aux pratiques innovantes mobilisée dans cette étude nous a permis de décrire une diversité de logiques d’action et de pratiques pour maîtriser les adventices qui s’avèrent, pour certaines, économes en carburant et sont en ce sens originales. L’analyse des logiques d’action au prisme du schéma décisionnel a quant à elle permis de mettre en résonance les pratiques mobilisées par l’agriculteur avec ses degrés d’exigence en matière de maîtrise des adventices. Les résultats montrent la diversité des niveaux de tolérance entre les agriculteurs de l’échantillon, mais aussi en fonction du type de culture. Nos résultats montrent que les groupes 3 et 4, plus tolérants aux adventices, ont une consommation en carburant à l’échelle du système de culture plus faible que les autres groupes. L’analyse de la consommation en carburant des systèmes de culture montre que la présence de couverts végétaux ne permet pas une économie en carburant. En effet, les opérations mécaniques pour implanter et détruire le couvert représentent un coût en carburant important. Nos résultats montrent que la consommation en carburant est très élevée et très variable sur culture de printemps. Pour diminuer cette consommation, l’agriculteur 7 de notre échantillon a émis l’hypothèse d’implanter directement des cultures de printemps dans un couvert vivant de trèfle ou de luzerne, ce qui, à l’heure actuelle, représente un défi technique, agronomique et scientifique majeur. Les connaissances acquises par les agriculteurs ayant des stratégies économes en carburant constituent une ressource importante, qu’il serait pertinent de mobiliser dans des processus de conception innovante faisant intervenir d’autres agriculteurs ou acteurs agricoles.
Remerciements
Ce travail a été initié et financé dans le cadre de l’appel à projets Expérimentation et Innovation 2017-2019 de la Région Nouvelle-Aquitaine (PDR FEADER Aquitaine, Limousin, Poitou-Charentes). Les auteurs tiennent à remercier les dix agriculteurs qui ont participé aux entretiens. Ils remercient Martine Géron et Olivier Guerin (Chambre d’agriculture de Charente-Maritime), Ambroise Becot (Chambre d’agriculture de Maine-et-Loire), Emilie Granger (Chambre d’agriculture Pays de la Loire), Bastien Dallaporta (ITAB), Karine Trouillard (GAB 17), Didier Mossion et Pierre Tourneur (Océalia), Marc Potier (CORAB), Nicolas Beaumont (Fédération des chasseurs) et Elodie Helion (Cultivons la Bio-Diversité en Poitou-Charentes). Ils remercient également Daphné Durant (INRAE), Anne Farruggia (INRAE), Bénédicte Roche (INRAE) et Myrielle Chalamet pour leurs relectures bienveillantes des versions.
Notes
[1] En agronomie, on appelle adventice ou flore spontanée toute plante poussant dans un champ cultivé, sans avoir été intentionnellement implantée par l’agriculteur
[2]Opération consistant, à l’aide d’un trieur, à séparer les graines de l’espèce cultivée, des impuretés et graines d’autres plantes.
[3] Les plantes de services sont les espèces implantées avant ou pendant une culture principale, qui dans la parcelle ou à proximité partagent avec elle une période significative de son cycle. Elles sont destinées à fournir un ou plusieurs avantages (services écosystémiques) à la culture en place ou aux suivantes dans la rotation et n’ont pas une finalité productive.
[4] Phénomène biologique par lequel un organisme produit une ou plusieurs substances biochimiques qui influencent la germination, la croissance, la survie et la reproduction d'autres organismes.
[5] Le collet est la zone assurant à la surface du sol la transition entre la tige et le système racinaire des plantes.
Références bibliographiques
Adeux, G., Munier-Jolain, N., Meunier, D. & others., 2019. Diversified grain-based cropping systems provide long-term weed control while limiting herbicide use and yield losses. Agronomy for Sustainable Development 39 :42. DOI : 10.1007/s13593-019-0587-x
Agence Bio., 2020. La production et le marché bio en France en 2020. https://www.agencebio.org/vos-outils/les-chiffres-cles/.
Aubertot, J. N., Clerjeau, M., David, C., Debaeke, P., Jeuffroy, M. H., Lucas, P., Monfort, F., Nicot, P., & Sauphanor, B., 2011. Pesticides, agriculture et environnement - Réduire l'utilisation des pesticides et en limiter les impacts environnementaux (Matière à débattre et décider). 1st Ed. Versailles : Editions Quæ, 136 p.
Bakker, L., Sok, J., van der Werf, W., & Bianchi, F. J. J. A., 2021. Kicking the habit: what makes and breaks farmers’ intentions to reduce pesticide use? Ecological Economics 180 : 106868. DOI : 10.1016/j.ecolecon.2020.106868.
Berthet, E. T., 2014. Concevoir l’écosystème, un nouveau défi pour l’agriculture. Paris : Presses des Mines, collection Sciences de la Conception, 272 p.
Berthet, E. T., Bosshardt, S., Malicet-Chebbah, L.,& others. 2020. Designing innovative management for cultivated biodiversity: lessons from a pioneering collaboration between French farmers, facilitators and researchers around participatory bread wheat breeding. Sustainability 12 (2) : 605. DOI : 10.3390/su12020605.
Bochu, J. L., Risoud, B., & Mousset, J., 2008. Consommation d’énergie et émissions de GES des exploitations en agriculture biologique : synthèse des résultats PLANETE 2006. Contribution de l’agriculture biologique et de nos choix alimentaires à l’effet de serre. Lempdes, France : Colloque inter- national : Agriculture biologique et changement climatique. https://hal.inrae.fr/hal-02821712/document
Brun, J., 2019. D’où viennent les bonnes idées ? 1st Ed. Paris : Diateino, 188 p.
Cerf, M., Dupré, L., Lasseur, J., Millard, J. B., Prost, L., & others., 2020. L'innovation en agronomie, quelle mise en perspective ? Agronomie, Environnement & Sociétés
10 (2) : 115-118. hal.inrae.fr/hal-03179264
Chantre, E., Cerf, M., Bail, M. L., 2015. Transitional pathways towards input reduction on French field crop farms. International Journal of Agricultural Sustainability 13 (1) : 69–86. DOI : 10.1080/14735903.2014.945316.
Chauvel, B., Darmency, H., Munier-Jolain, N., & Rodriguez, A., 2018. Gestion durable de la flore adventice des cultures. Versailles : Éditions Quae, 354 p.
Chizallet, M., Prost, L., & Barcellini, F., 2019. Comprendre l’activité de conception d’agriculteurs en transition agroécologique : vers un modèle trilogique de la conception. Psychologie Française, Elsevier Masson 64 (2) : 119-139. DOI : 10.1016/j.psfr.2019.03.001.
Choisis, J. P., Ramonteu, S., & Mischler, P., 2018. Des systèmes innovants et multi-performants fondés sur l’intégration culture-élevage. Fourrages 235 : 187-193.
Colomb, B., Glandières, A., Carpy-Goulard, F., Lecat, N., Pelletier, A., & others., 2009. Analyse énergétique des systèmes de grandes cultures biologiques : Impact du niveau d’intensification. Innovations Agronomiques 4 : 176-181
Cordeau, S., & Moreau, D., 2017. Gestion des adventices au moyen des cultures intermédiaires multi-services : potentiels et limites. Innovations Agronomiques 62 : 82-100.
Coutelle, M., 2016. L'agriculture en Charente-Maritime au XXe siècle. Guide et jalons pour la recherche. La Crèche : Geste, 519 p.
Deguine, J. P., & Penvern S., 2014. Organic Farming, Prototype for Sustainable Agricultures. London: Springer Dordrecht, 489 p.
Eurostat., 2020. Sales of pesticides in the EU. https:// ec. europa. eu/euros tat/ fr/ web/ produ cts- euros tat- news/-/ DDN- 20200 603-1.
FAOSTAT., 2020. Pesticide use. http:// www. fao. org/ faost at/ en/# data/RP.
Fleury, P., 2011. Agriculture biologique et environnement : des enjeux convergents. Dijon : Educagri Editions, 274 p.
Fleury, P., Chazoule, C., & Peigné, J., 2014. Ruptures et transversalités entre agriculture biologique et agriculture de conservation. Économie rurale 339-340 : 95 - 112. DOI : 10.4000/economierurale.4247
Frottier, C., 2016. Evaluer les performances de maîtrise des adventices de systèmes de grande culture biologique dans une démarche d’analyse multi-sites et pluricritère. Mémoire de diplôme d’agronomie approfondi, ESITPA, Mont Saint Aignan, 87 p.
IPBES., 2016. The assessment report of the Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services on pollinators, pollination and food production. Bonn, Germany: Secretariat of the Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services. ipbes.net/assessment-reports/pollinators
Jacquet, F., Huyghe, C., Barouki, R., Barraquand, F., Bertrand, C., Cote, F., Cravedi, J. P., Fontaine, L., Jeuffroy, M. H., Labarthe, P., & others., 2019. Cultiver et protéger autrement : Alternatives aux phytosanitaires : mobiliser les leviers de l’agroécologie, du biocontrôle et de la prophylaxie pour une agriculture performante et durable. Propositions pour un Programme Prioritaire de Recherche.
Jacquet, F., Jeuffroy, M. H., Jouan, J., Le Cadre, E., Litrico, I., Malausa, T., Reboud, X., & Huyghe, C., 2022. Pesticide-free agriculture as a new paradigm for research. Agronomy for Sustainable Development 42:8. DO : 10.1007/s13593-021-00742-8.
Jas, N., 2010. Pesticides et santé des travailleurs agricoles en France. Questions anciennes, nouveaux enjeux. Le Courrier de l'environnement de l'INRA 59 : 47-59.
Joannon, A., Carof, M., Cotinet, P., Dupont, A., Guezengar, A., & others., 2017. Organic cropping systems tend to be more sustainable than low-input ones - A case study in Brittany, France. 5 th ISOFAR Scientific Conference "Innovative Research for Organic 3.0" at the 19 th Organic World Congress, New Dehli, India.
Labreuche, J., Laurent, F., & Roger-Estrade, J., 2014. Faut-il travailler le sol ? Acquis et innovations pour une agriculture durable. Versailles : Éditions Quae, 192 p.
Lemery, B., Ingrand, S., Dedieu, B., & Dégrange, B., 2005. Agir en situation d’incertitude : le cas des éleveurs de bovins allaitants. Économie rurale 288 : 57-59. DOI : 10.4000/economierurale.2718.
MAAPRAT-MEDD, 2011. Guide pratique pour la conception de systèmes de culture plus économes en produits phytosanitaires. Application aux systèmes de polyculture. Paris, France : Ministères en charge de l’agriculture et de l’écologie. agriculture.gouv.fr/telecharger/36495
Meynard, J. M., Dedieu, B., & Bos, A., 2012. Re-design and co-design of farming systems. An overview of methods and practices. Dans Darnhofer, I., Gibon, D., Dedieu, B., 2012. Farming Systems Research into the 21st Century: The New Dynamic. Paris : Springer, 407–432 p.
Meynard, J. M., & Dourmad, J. Y., 2014. L’innovation en élevage : de nouvelles démarches pour de nouveaux enjeux. INRA Productions Animales 2 : 75-76. DOI : 10.20870/productions-animales.2014.27.2.3056.
Mohler, C. L., Caldwell, B. A., Marschner, C. A., Cordeau, S., Maqsood, Q., Ryan, M. R., & DiTommaso, A., 2018. Weed Seedbank and Weed Biomass Dynamics in a Long-Term Organic Vegetable Cropping Systems Experiment. Weed Science 66 (5): 611–626. DOI: 10.1017/wsc.2018.52.
Pietrzak, D., Kania, J., Malina, G., et & others., 2019. Pesticides from the EU first and second watch lists in the water environment. CLEAN Soil Air Water 47 (7) : 1800376. DOI : 10.1002/clen.201800376.
Reau, R., Cros, C., Leprun, B., Merot, E., Omon, B., & Paravano, L., 2016. La construction des schémas décisionnels et leur mobilisation dans le changement des systèmes de culture. Agronomie, environnement &sociétés 6 (2) : 83-92.
Roussary, A., Busca, B., Goulard, F. C., Dumont, A., & Salles, D., 2013. Pratiques phytosanitaires en agriculture et environnement : des tensions irréductibles ? Economie Rurale 333 : 67 - 80. DOI : 10.4000/economierurale.3804.
Salembier, C., 2019. Stimuler la conception distribuée de systèmes agroécologiques par l’étude de pratiques innovantes d’agriculteurs. Thèse de doctorat, Université Paris-Saclay. 255 p.
Salembier, C., Segrestin, B., Weil, B., & others., 2021. A theoretical framework for tracking farmers’ innovations to support farming system design. Agronomy for Sustainable Development 41: 61. DOI: 10.1007/s13593-021-00713-z.
Sautereau N., & Benoit M., 2016. Quantification et chiffrage des externalités de l’agriculture biologique, Rapport d'étude ITAB, 136 p.
Savary S., 1991. Approches de la pathologie des cultures tropicales, L’exemple de l’arachide en Afrique de l’Ouest. Paris : Editions Orstom et Karthala, 293 p.
Schneider, M. K., Lüscher, G., Jeanneret, P., Arndorfer, M., Ammari, Y., & others., 2014. Gains to species diversity in organically farmed fields are not propagated at the farm level. Nature Communications, Nature Publishing Group 5: 4151. DOI: 10.1038/ncomms5151.
Schoonhoven, Y., & Runhaar, H., 2018. Conditions for the adoption of agroecological farming practices: a holistic framework illustrated with the case of almond farming in Andalusia. International Journal of Agricultural Sustainability 16 (6): 442–454. DOI: 10.1080/14735903.2018.1537664.
Stomph, T., Dordas, C., Baranger, A., & others., 2020. Designing intercrops for high yield, yield stability and efficient use of resources: are there principles? Advances in Agronomy 160 (1): 1-50. DOI: 10.1016/bs.agron.2019.10.002.
Toffolini, Q., Jeuffroy, M. H., & Prost, L., 2016. L’activité de re-conception d’un système de culture par l’agriculteur : implications pour la production de connaissances en agronomie. Agronomie, Environnement & Sociétés, 6 (2) : 193-201.
Walter, N., & others., 2020. Coûts des opérations culturales 2020 des matériels agricoles. Chambres d’Agriculture France, 78 p
Yvoz, S., Petit, S., Biju-Duval, L., & Cordeau, S., 2020. A framework to type crop management strategies within a production situation to improve the comprehension of weed communities. European Journal of Agronomy 115: 126009. DOI: 10.1016/j.eja.2020.126009.
Zadoks J. C., 1985. On the conceptual basis of crop loss assessment: the threshold theory, Annual Review of phytopathology 23: 455-473. DOI : 10.1146/annurev.py.23.090185.002323
Les articles sont publiés sous la licence Creative Commons (CC BY-NC-ND 2.0)
Pour la citation et la reproduction de cet article, mentionner obligatoirement le titre de l'article, le nom de tous les auteurs, la mention de sa publication dans la revue AES et de son URL, la date de publication.