Réduire drastiquement les pertes d’azote du champ à l’assiette pour notre santé et la planète
Michel Duru* et Olivier Thérond**
* UMR 1248 AGIR, INRAE, Université Toulouse (auteur correspondant - michel.duru@inrae.fr)
** Université de Lorraine, INRAE, LAE (olivier.therond@inrae.fr)
Résumé
L’azote est indispensable à la vie, mais depuis le milieu du 20ème siècle, l’apport d’azote d’origine industrielle a augmenté fortement la quantité d’azote réactif dans les écosystèmes puisqu’environ 80% de l’azote apporté aux plantes est perdu avant d’arriver dans notre assiette. Ces émissions massives d’azote dans l'eau et dans l'air affectent gravement notre santé et celle de la planète mais sont moins médiatisées que le changement climatique. Malgré des politiques dédiées, les apports et les rejets ont peu diminués depuis 20 ans. Des changements radicaux en agriculture, dans notre alimentation et dans le recyclage permettraient toutefois de diviser par deux ces émissions. Mais ils nécessitent de réorienter en profondeur les politiques publiques et le comportement de tous les acteurs du système alimentaire.
Mots clefs : agroécologie, efficience, Europe, recyclage,système alimentaire
Abstract
Drastically reduce nitrogen losses from field to plate for our health and the planet
Nitrogen is essential for life but since the middle of the 20th century, the supply of nitrogen comes mainly from an artificial manufacturing process, its increasingly intensive use has greatly increased the quantity of reactive nitrogen in ecosystems, so much so that around 80% of the nitrogen supplied to the plants is lost before reaching our plate. Although less publicized than climate change, the massive emissions of nitrogen into the water and into the air seriously affect our health and that of the planet. Despite dedicated policies (nitrates plan, etc.), inputs and discharges have been almost reduced for 20 years. Radical changes in agriculture, in our food and in recycling would, however, make it possible to halve these emissions. But they require an in-depth reorientation of national and territorial public policies.
Keywords: agroecology, efficiency, Europe, recycling, food system
Réduire les pertes d’azote : un enjeu de santé globale
L’azote est indispensable à la vie car il permet la croissance des plantes et il est le constituant de base des protéines indispensables à notre métabolisme. En Europe, depuis le milieu du 20ème siècle, l’apport d’azote provient surtout du processus de fabrication industriel « Haber-Boch ». Son usage de plus en plus intensif a permis d’augmenter fortement la production et l’utilisation de fertilisants de synthèse et, par voie de conséquence, les rendements des cultures, contribuant ainsi à la sécurité alimentaire. Mais cette utilisation massive a aussi augmenté les quantités rejetées dans l’eau et dans l’air, à tel point qu’en Europe environ 80% de l’azote apporté aux plantes est perdu avant d’arriver à notre assiette (Leip et al., 2022). La grande partie de cet azote perdu est dit réactif (nitrates, ammoniac, protoxyde d’azote) car il interfère avec les cycles biogéochimiques et la santé du vivant et des habitats. La perturbation du cycle de l’azote est l’une des six limites planétaires (Rockstrom et al., 2009)[1] qui ont été franchies, contribuant à rendre le système Terre plus instable et moins résilient. Alors qu’en 2015, les pertes d’azote dans l’environnement ont été estimées à 150 millions de tonnes (Mt) au niveau mondial, le seuil à ne pas dépasser a été fixé entre 62 et 82 Mt par an, soit 41 à 55 kg d’azote excédentaire (surplus) par hectare et par an (Steffen et al., 2015).
Au début des années 2000, des recherches ont permis de quantifier les flux d’azote à large échelle, en pointant l’importance des pertes du fait de la faible efficience de l’utilisation de l’azote (Galloway et al., 2003). De premières pistes pour réduire ces pertes ont été identifiées, comme la modification des pratiques agricoles pour augmenter l’efficience d’utilisation de l’azote (Galloway et al., 2008), ou encore la réduction de notre consommation de protéines animales (Westhoek et al., 2011).
Dans le même temps, les recherches ont progressé pour évaluer les effets de ces pertes sur les écosystèmes et la santé humaine.
Les émissions dans l’air concernent le protoxyde d’azote (N2O) et l’ammoniac (NH3). Les émissionsde N2O proviennent principalement de l’épandage des engrais minéraux et dans une moindre mesure des engrais organiques (Lemaire et al., 2023). Ils constituent plus de 40% des émissions de gaz à effet de serre (en équivalent CO2) de l’agriculture. Les émissions d’ammoniac qui proviennent surtout de l’élevage (environ 80%) affectent la santé humaine et la santé des écosystèmes. L’ammoniac peut se recombiner dans l’atmosphère avec des oxydes d’azote et de soufre pour former des particules fines (PM2,5) dont les effets délétères sur la santé humaine sont démontrés[2].
Les excès d’azote contribuent à enrichir en nitrates les eaux de surface (rivières et milieux lacustres) et les eaux des littoraux marins. Il en est de même des pertes en phosphore (Withers et al., 2020), Ces eaux deviennent alors des milieux favorables au développement de plantes aquatiques et d’algues qui conduit à des phénomènes d’eutrophisation. La décomposition de cette biomasse végétale entraîne une consommation d’oxygène aux dépens de la faune aquatique et crée des conditions de putréfaction avec production de composés malodorants ou dangereux, notamment de sulfure d’hydrogène (Germon, 2022). Par ailleurs, les nitrates, en acidifiant les sols, modifient aussi leur potentiel rédox, ce qui rend les plantes plus sensibles aux maladies et bioagresseurs, entrainant un surcroît d’utilisation de pesticides (Husson et al., 2022).
Les nitrates en eux-mêmes ne sont pas dangereux pour la santé humaine. Cependant, certaines circonstances (infection gastro-intestinale) peuvent créer des conditions favorables à la réduction des nitrates en nitrites avec possibilité de production de nitrosamines cancérigènes. On sait aussi que les nitrates peuvent être transformés naturellement en nitrites par les microorganismes de notre tube digestif. Pour ces raisons, l’OMS a défini une norme de concentration maximale acceptable de nitrates dans l’eau potable (50 mg/l). Le dépassement de ce seuil conduit à fermer les captages pour respecter les normes de potabilité[3].
A partir d’une revue de la littérature scientifique récente, notre objectif ici est de quantifier les flux d’azote à chaque maillon du système alimentaire au niveau européen, en identifiant l’origine des pertes d’azote réactif (Nr), puis en caractérisant les principaux leviers pour les réduire à l’échelle du système alimentaire, c’est-à-dire de l’amont de l’agriculture (agrofourniture et commerce international) à l’aval de l’alimentation (gestion des déchets). A cet effet, on examinera tout particulièrement le rôle des prairies, l’importance du type de protéines produites et consommées (végétales vs animales), les possibilités de recyclage et d’augmentation de l’efficience d’utilisation selon le niveau d’ambition technologique retenu.
La cascade de l’azote en Europe : des pertes à toutes les étapes du champ à l’assiette
Des pertes en pagaille
Pour quantifier les flux d’azote, nous avons retenu les deux principales études récentes modélisant ces flux à l’échelle du système alimentaire en Europe (Encadré 1 et Tableau 1).
| Billen et al., 2021 (E1) | Leip et al., 2022 (E2) |
Périmètre | UE 27 + UK | UE 27 |
Echelle système alimentaire, incluant les excréments humains | O | O |
Quantification des usages de la biomasse hors alimentation humaine (animaux de compagnie, produits biosourcés) | N | O |
Quantification de la part d’azote réactif relativement à l’ensemble des pertes | N | O |
Pertes d’azote dans les pays d’où proviennent les importations de soja | N | O |
Prairies permanentes distinguées des cultures | O | N |
Modélisation au grain des pays et régions | O | N |
Construction de scénarios | O | O |
Tableau 1 : Caractéristiques considérées (O : oui, N : non) des deux études (E1 et E2) modélisant les flux d’azote en Europe au niveau du système alimentaire
Pour caractériser l’utilisation et les pertes d’azote, nous utiliserons les indicateurs suivants (Liang et al., 2021) : (i) l’efficience d’utilisation de l’azote (EUN : N dans les produits/N apporté)[4] calculé le plus souvent pour l’agriculture, de l’échelle de la parcelle à un territoire, ou parfois à l’échelle du système alimentaire ; (ii) l’utilisation virtuelle de l’azote (Nr perdu/N dans les produits) calculé à l’échelle du système alimentaire possiblement par produit ; (iii) l’empreinte azote par consommateur (N apporté/personne) calculé par pays ou régime alimentaire.
|
| E1 : Billen | E2 : Leip | Commentaire |
Flux (Mt ou Tg) | N apporté | 21 | 20 |
|
N sortie ferme (contenu dans les produits vendus) | 8,5 | 7,2 |
| |
N consommation humaine | 3,3 | 3,7 | Pour E2 1,2 sont recyclés (récupération de déchets) | |
N perdu | 15 | 17 | N réactif et non réactif | |
Indicateurs | EUN ferme (%) | 40 | 34 |
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EUN système alimentaire (%) | 16 | 18 | Non corrigé des imports/exports de produits agricoles et des usages non alimentaires | |
Utilisation virtuelle (ratio) | 4,5 | 4,6 | ||
Empreinte N (kg/habitant) | 39 | 44 |
Tableau 2 : Principaux flux d’azote et indicateurs d’utilisation pour les études E1 et E2
EUN : efficience de l’utilisation de l’azote
Les principales données sont rassemblées dans le tableau 2 et les principaux flux sont représentés sur la figure 1 sur la base des données de E2.
L’apport total d’azote (engrais de synthèse, fixation symbiotique, dépôt atmosphérique, apport par le soja) à l’agriculture est de l’ordre de 20-21 Mt. Le faible écart entre les deux études (1 Mt) correspond à des différences sur les dépôts atmosphériques et la fixation symbiotique qui sont plus élevés dans E1 (respectivement 2,9 et 4,1 Mt) que dans E2 (respectivement 0,7 et 1,6 Mt). A l’inverse, l’import-export pour la nourriture est déficitaire pour E2 et excédentaire pour E1. Au final, la consommation apparente d’azote pour l’alimentation humaine se situe entre 3,3 et 2,5, sachant que E2 y ajoute 1,2 Mt d’N recyclé, vraisemblablement les déchets.
A l’échelle du système alimentaire, les pertes sont estimées selon les auteurs des deux études à 15 et 17 Mt, soit environ 80% des apports totaux. Les valeurs supérieures calculées dans E2 viennent en partie du fait que sont comptabilisés 3 Mt émises hors Europe notamment pour la culture du soja. E2 estime les pertes d’azote réactif à 78% des pertes totales ; il s’agit principalement de NO3- et de NH3 ; le reste étant du dioxyde d’azote (N2) neutre vis-à-vis du réchauffement climatique. Les émissions de protoxyde d’azote (N2O), 140 Mt CO2eq, correspondent à une faible quantité d’azote du fait du fort pouvoir de réchauffement de ce gaz[5].
Ces pertes totales très importantes proviennent de la faible efficacité d'utilisation de l'azote (EUN), entre 34 et 40% pour l’agriculture et 17% à l’échelle du système alimentaire. Elles sont plus importantes à la ferme que lors des étapes de transformation-distribution. Les pertes d’azote sont estimées respectivement à 2 et 0,5 pour les productions animales et les productions végétales (E1), et à 3,5 pour l’ensemble (E2). La gestion de nos déchets est aussi très inefficiente puisque seulement 19% de l’azote qu’ils comprennent est recyclé.
Le recyclage des déjections animales concerne des quantités importantes, en moyenne 9,6 Mt, les 2/3 étant attribués aux cultures (E1). Les cultures fournissent plus d’azote à l’élevage qu’elles n’en reçoivent des déjections (6,5 vs 4,6 Mt).
L’utilisation virtuelle de l’azote est d’environ 4,5, ce qui signifie qu’il y a plus de quatre fois d’azote perdu que d’azote contenu dans les produits issus de l’agriculture.
L’empreinte azote d’un consommateur européen se situe entre 39 et 44 kg N par an.
Légende
N apporté : engrais + fixation symbiotique + retombées atmosphériques+ soja importé
N sortie ferme : flux provenant des cultures et des élevages
N consommation humaine : 5,7Mt
Entrées d’azote en noir, flux en gris, pertes en rouge et recyclage en vert
Les dimensions des cylindres et des flèches sont approximativement proportionnelles aux quantités. Les flux de faible ampleur ne sont pas indiqués.
Des pertes qui dépendent des types de production et donc du régime alimentaire
L’efficience d’utilisation de l’azote moyenne en cultures et prairies est de 63% (E2). Elle est supérieure pour les prairies permanentes (65%) en comparaison des cultures (56%) (E1). Elle beaucoup plus faible pour les productions animales puisqu’elle est estimée de 19% (E2) à 32% (E1), mais atteint 73% si l’on tient compte de l’apport par les déjections (E2). Comme les productions animales sont des productions secondaires basées sur l’utilisation des produits végétaux, ceci signifie que même après prise en compte du recyclage des déjections, les pertes en azote au niveau du système agricole sont amplifiées lors du passage par l’animal du fait d’un découplage entre carbone et azote. Par exemple, pour 100 unités d’azote apportées, 63 sont valorisées sous forme végétale et, au mieux, 46 (100 x 0,63 x 0,73) sous forme animale. Néanmoins le recyclage des effluents permet de réduire les pertes liées aux animaux et donc peut permettre une diminution de l'apport de N minéral sur les cultures relativement à une situation sans recyclage. Par ailleurs, il y a une limite de chargement animal à ne pas dépasser au-delà de laquelle le découplage par l'animal dépasse les capacités de recouplage par la végétation (Soussana et Lemaire, 2014 ; Lemaire et al., 2023). Ce classement entre cultures et élevages est cohérent avec les quantités d’azote perdues par g de protéine produite (tableau 3) : les pertes d’azote des produits animaux sont 3 à 40 fois supérieures à celles des produits végétaux (Leip et al., 2014).
| g d’N perdu pour 100g de produit animal ou végétal |
Bœuf | 170 |
Porc | 55 |
Poulet | 45 |
Lait | 60 |
Céréales | 17 |
Légumineuses | 4 |
Tableau 3 : Azote perdu (d’après Leip et al., 2014)
En conséquence, le degré de végétalisation de l’assiette détermine la quantité d’azote nécessaire pour produire notre alimentation. La différence de besoin en azote entre un régime occidental et végétarien est estimée à presque 25% (Martinez et al., 2019). En Suisse, il a été calculé que suivre les recommandations nutritionnelles (moins de viande…) permettrait de réduire l’empreinte azote de 34% (Chen et al., 2019).
Des changements de pratiques insuffisants pour engendrer une diminution des pertes
Au niveau mondial, les pertes augmentent régulièrement depuis 1960 malgré de nombreuses conférences et engagements (Sutton et al., 2021). En Europe, l'utilisation d'engrais azotés minéraux a été multipliée par 3,4 entre le début des années 60 et 2000, même si leur utilisation a diminué de 25% depuis (FAO). Suite à l’application de la directive nitrates, les émissions d’ammoniac ont baissé de 22% et la concentration des nitrates dans les rivières de 10% (Velthof et al., 2014). Par contre, les émissions dans les nappes ont augmenté de 6% (tableau 4). Ces évolutions sont à mettre en parallèle avec la faible réduction des apports (-10%) et de la consommation de viande (-6%).
| 1990 | 2000-2004 | 2016-2019 |
Engrais N de synthèse (Mt) (FAOStat) | 11 | 10 | 10 |
Engrais kg/ha[6] | 73 | 63 | 60 |
Emissions d’ammoniac (t/an)[7] | 4900 | 4000 | 3800 |
Concentration en nitrates dans les nappes (mg/l)[8] | 19,3 | 20 | 20,5 |
Concentration en nitrates dans les rivières (mg/l) | 2,2 | 2,1 | 2 |
Consommation de viande (kg/h/an) (Yilmaz et al., 2021) | 80 | 78 | 75 |
Tableau 4 : Evolution de quelques indicateurs concernant l’azote et la consommation de viande
De nécessaires changements de rupture pour réduire les pertes en azote
Quatre principaux leviers pour réduire les pertes d’azote réactif
La combinaison de mesures en agriculture et élevage, dans l’alimentation et un meilleur recyclage permettrait de réduire les émissions de Nr jusqu'à 50 % ; celles d’azote neutre (N2) pourraient augmenter de 30 % surtout via l’amélioration de l’épuration des eaux usées (Corrado et al., 2020).
Développer des systèmes de cultures agroécologiques
- Des stratégies minimisant les risques
Si tous les leviers d’action connus étaient mis en œuvre pour les productions végétales, les EUN atteindraient respectivement 82 et 92% pour l'Europe du Nord et du Sud (Huchings et al., 2020). Ces leviers concernent les inhibiteurs de nitrification, le remplacement des urées dans les engrais, l’incorporation rapide des engrais minéraux et organiques dans le sol, le développement des cultures intermédiaires, la réduction du travail du sol, notamment en automne et en hiver. L’efficacité de ces pratiques est connue. Néanmoins elles génèrent des coûts qui pour certains pourraient être pris en charge par les politiques agricoles. Pour les terres arables, la valeur d’EUN de 90 %, au-dessus de laquelle il y a un risque élevé d'épuisement de l’N du sol, est bien fondée pour les situations où les nombreux leviers mentionnés ci-dessus sont déjà mis en oeuvre. Pour les systèmes mobilisant moins de leviers, une valeur de 70 % est plus appropriée (Huchings, 2020).
- Changer de paradigme pour piloter la fertilisation
La fertilisation azotée des cultures a longtemps été fondée sur une analyse statistique de la réponse de leur rendement à des doses croissantes de fertilisants. Ce pronostic a conduit à une pratique d’assurance où l’on applique des doses d’azote excessives, afin de ne pas pénaliser les rendements. Une méthode prévisionnelle du bilan d’azote d’une culture a été mise au point pour corriger cette tendance, mais elle reste très imparfaite. Le diagnostic de l’état de nutrition azotée d’une culture en cours de campagne permet de résorber cette incertitude liée à la variabilité des conditions locales. L’intégration de ce diagnostic dans des outils d’aide à la décision permet d’effectuer les apports de fertilisants seulement « là » et « quand » l’état nutritionnel des cultures le nécessite. Ils doivent permettre d’atteindre les rendements fixés en minimisant les impacts des fuites d’azote (Lemaire et al., 2022).
- Réduire la consommation de protéines animales
Pour réduire les pertes d’azote, la diminution de la consommation de protéines animales est un autre levier clef identifié tant au niveau mondial (Tilman et Clark, 2014) qu’européen (Leip et al., 2014).
Billen et al. (2021) montrent que la végétalisation de l’assiette (30% de protéines animales au lieu de 60% et intégration de légumineuses) permettrait de réduire l’azote ingéré de 15%, les surplus de 6%, le NH3 de 30%, le N2O et NO3- seraient proches de zéro.
Leip et al. (2022) ont comparé trois régimes : démitarien (réduction de moitié de la consommation de viande), végétarien (pas de viande mais des produits laitiers et des œufs) et végétalien (pas de produits d'origine animale). L’option couplant le régime démitarien et l’ajustement de la diète à nos besoins, car l'apport énergétique brut des consommateurs dépasse les besoins énergétiques de 35 % (van den Bos et al., 2020) et en protéines de 70 % (Westhoek et al., 2011), permettrait de réduire les pertes en azote de moitié, sans être aussi contraignant pour le consommateur que les deux autres régimes.
Par ailleurs, il est montré que ces régimes végétalisés sont meilleurs pour la santé. Il a été ainsi montré par des études épidémiologiques que plusieurs indicateurs santé étaient meilleurs pour le cinquième de la population enquêtée dont la consommation de protéines était proche des recommandations (1,1 g /kg de poids corporel) en comparaison du cinquième qui en était le plus éloigné (consommation de protéines supérieure de 40% dont 2/3 de protéines animales (Kesse-Guyot et al., 2021).
- S’orienter vers moins et mieux d’élevage
Le secteur de l'élevage est un facteur majeur de la transgression de plusieurs frontières planétaires par l'humanité : flux biochimiques, changement climatique et changement d’utilisation des terres. Pour ce secteur, l’efficience d’utilisation de l’azote peut atteindre un maximum de 71 % en Europe du Nord et 80 % en Europe du Sud. Le potentiel d'augmentation le plus faible concerne les ruminants élevés pour la production de viande sur des prairies permanentes car l’EUN est déjà plus élevé que pour les autres élevages et peu de mesures supplémentaires sont disponibles (Hutchings et al., 2020).
Réduire les pertes d’azote liées à l’élevage passe par une modification des pratiques de production mais aussi de consommation pour respecter les limites planétaires (Bowles et al., 2019). Un levier important est le développement des légumineuses pour viser l’autonomie protéique. En outre, adapter la production de produits animaux au niveau souhaitable pour la consommation humaine nécessite aussi de privilégier les formes d’élevage dont l’alimentation n’entre pas en compétition avec la nôtre, comme l’élevage ruminants herbager sur prairies non mécanisables. Pour cette raison, ce ne sont pas forcément les formes d’élevage qui génèrent les pertes d’azote les plus élevées (tableau 3) qui doivent être les plus réduites. En effet, la fraction des ressources non consommables par l’homme utilisées pour les monogastriques vont de 30-45% à 82-85% alors que pour les ruminants elles vont seulement de 7-22% à 8-42% selon que la ressource considérée est l’aliment (Laisse et al., 2019) ou la terre (Duru et al., 2021). De plus, il est important de noter que les prairies fournissent de nombreux services à l’agriculture et à la société (Duru et Therond, 2018). En outre, sous réserve d’un chargement modéré et d’une autonomie en protéines de l’élevage, comme mentionné ci-avant, le recyclage des effluents permet d’améliorer l’EUN de ces élevages (Lemaire et al., 2023).
L’agriculture biologique change peu les pertes d’azote par kg de produit pour les productions végétales ; par contre, elles sont augmentées de 10% en moyenne pour les productions animales, et de 124% pour la production de viande bovine (Cattell et al., 2020). En conséquence, à régime alimentaire comparable, l’empreinte azote d’un mangeur bio est en moyenne supérieure de 25% d’un mangeur conventionnel. Cependant, réduire la consommation de viande comme le font les mangeurs bio en France, conduirait à une moindre empreinte azote comme observé pour l’empreinte surface et les émissions de gaz à effet de serre de l’alimentation (Kesse-Guyot et al., 2021).
- Réduire le gaspillage et recycler les urines
La réduction du gaspillage alimentaire réduirait la demande de produits agricoles pour l'alimentation et les pertes d'azote associées. De même, l’amélioration du recyclage des déchets et notamment des excréments humains augmenterait significativement le recyclage de l'azote (Leip et al., 2022). Mais pour être efficace, cette solution est complexe à mettre en œuvre. D’une part, il faut trouver des technologies de traitement des eaux usées afin de réduire la teneur des urines en xénobiotiques et métaux lourds. D’autre part, pour que l’azote récupéré génère moins d’émissions que les engrais de synthèse, il conviendrait de recoupler l'azote des urines avec du carbone organique afin d'introduire dans le sol un composé avec un rapport C/N de l'ordre de 8-12 susceptible de participer plus directement au turn-over microbien (Lemaire et al., 2023)
De nécessaires changements systémiques pour respecter les limites de sécurité
En Europe, maitriser les flux d’N dans les écosystèmes suppose de ne pas dépasser les seuils de dépôts atmosphériques qui déterminent la charge critique en N pour la biodiversité terrestre, entre 5 et 35kg/ha selon le services écosystémique considéré (de Vries et Schulte-Uebbing 2019), la concentration d’N dans les eaux de ruissellement (2,5 mg N l-1) pour protéger les écosystèmes aquatiques et la concentration en nitrates des lixiviats vers les eaux souterraines (50 mg NO3/1) (de Vries et al., 2021). Par exemple, pour respecter les seuils de dépôt atmosphérique, les apports de N dans l'UE doivent être réduits de 31 % en moyenne, allant de 0 % dans plusieurs pays à 59 % en Irlande et au Danemark. Les réductions les plus fortes sont requises dans les régions d'élevage intensif, telles que le Benelux, la Bretagne et la vallée du Pô. Pour respecter les seuils de concentration de N dans les eaux de ruissellement vers les eaux de surface, les apports de N doivent être réduits de 43 % en moyenne, allant de 2 % en Estonie à 74 % aux Pays-Bas. Les apports critiques moyens de N pour respecter le seuil de concentration de NO3- dans les lixiviats vers les eaux souterraines sont proches des apports réels (année 2010), même si les seuils de lessivage sont dépassés sur 18 % des terres agricoles (ibid).
Les scénarios de systèmes alimentaires présentés dans les études E1 et E2 montrent que des ajustements paramétriques permis par les technologies en agriculture et pour la gestion des déchets ne suffiront pas à eux seuls pour atteindre l’objectif de réduire de moitié les pertes d’azote à horizon 2050. Ces scénarios montrent que le plus grand potentiel d'augmentation de l'efficacité de l'azote du système alimentaire actuel réside donc dans le secteur de l'élevage (pratiques d'alimentation, amélioration de la gestion du fumier) couplée à un régime alimentaire plus végétalisé. Afin de rester dans la limite planétaire pour l’azote, les recherches convergent donc sur la nécessité de combiner les quatre leviers présentés dans la section précédente. Un changement de paradigme s’impose donc. Des changements plus structurels, tels que ceux examinés dans les études E1 et E2, sont nécessaires pour atteindre l'autosuffisance alimentaire en Europe dans le cadre d’objectifs environnementaux que l’Europe s’est fixée.
Une approche plus holistique dans les politiques publiques est donc nécessaire. Liang et al., 2021 proposent de considérer cinq domaines -Production, Personnes, Planète, Politique et Partenariats- pour dessiner les lignes directrices d’une gestion durable de l’azote avec des métriques spécifiques. Certaines ont déjà été présentées (efficience d’utilisation de l’azote, empreinte azote par consommateur, frontière planétaire), mais d’autres devraient aussi être considérées (intensité spatiale, prix). Le concept d'intensité spatiale de l’azote réactif permet de définir un niveau d'intensité des pertes par zone géographique et de le cartographier. Cet indicateur de pertes spatialisées peut varier beaucoup entre régions. Il permet d’identifier des territoires où les pertes sont les plus élevées. L'établissement d'un prix de l’azote basé sur une analyse coûts-bénéfices permettrait de définir une valeur monétaire qui reflète à la fois les coûts des produits agricoles pour leur consommation en N et les coûts des dommages à l'environnement, aux ressources, à la santé humaine, aux écosystèmes, au climat et à la société dus aux pertes de Nr (coût sociétal). Le prix de l’azote et un système de « bonus-malus » pourraient prendre des modalités d'application différentes selon les parties prenantes et tenir compte d’objectifs spécifiques à chacune d’elle. En agriculture, le prix de l'azote pourrait être utilisé pour attribuer des crédits d'azote aux agriculteurs qui produisent avec une moindre pollution que leurs pairs (Liang et al., 2022).
Pour une approche intégrée des enjeux et leviers
Des enjeux interdépendants et leviers à vocations multiples
Les cycles de l’azote et du phosphore, la biodiversité et le climat sont les trois limites planétaires largement dépassées, du fait, notamment, des activités agricoles. Par ailleurs, la santé humaine (y compris la sécurité alimentaire) est au cœur des enjeux d’un système alimentaire durable. Les crises correspondant à ces enjeux sont interdépendantes. Par exemple, la culture de soja permise par la déforestation est une forte contributrice aux perturbations du cycle de l’azote (Rezende et al., 2023), aux émissions de gaz à effet de serre et à la perte de biodiversité. L’utilisation des tourteaux de soja dans des systèmes d’élevage laitiers les moins herbagers est à l’origine d’un lait appauvri en oméga-3, acides gras clef pour la santé dont notre alimentation est très déficitaire (Duru et al., 2021). Röös et al. (2022) montre que seul un scénario basé sur des pratiques agroécologiques à grande échelle couplé à des changements alimentaires drastiques et à une réduction des déchets, permettrait d’atteindre les principaux objectifs environnementaux que s’est fixé l’Europe. D’autres scénarios testés reposant par exemple sur les seules technologies ne permettent pas d’atteindre les objectifs. Autrement dit, il y a recouvrement entre les changements à mettre en œuvre pour l’azote, le climat, la biodiversité et la santé. Il s’agit alors de considérer conjointement la santé des sols, plantes, animaux et écosystèmes et la santé humaine, autrement dit de développer une approche de type « one health » élargie (Duru et Therond, 2023).
Cependant, les politiques publiques reposent toujours sur une vision en silo de l’agriculture et de l’alimentation[9]. Ainsi, les mesures préconisées par la stratégie européenne de la ferme à la table, bien que plus ambitieuses que celles promues par la PAC jusqu’ici ont cependant été évaluées comme insuffisantes pour atteindre l'objectif de réduire de moitié les pertes d'azote dans l’eau et l’air (Billen et al., 2022), notamment parce que deux leviers, le changement de régime alimentaire et le recyclage des urines ne sont pas considérés.
L’obtention du label Haute Valeur Environnementale (HVE) est basée sur de bonnes pratiques pour la biodiversité, les pesticides, l’eau et l’azote. Pour le calcul du score azote, la fixation symbiotique des légumineuses n’est pas considérée dans le bilan[10], alors que c’est la condition pour réduire les intrants azotés de synthèse et les émissions qui en résultent dans l’eau et dans l’air. Pourtant le label HVE donne accès à des primes et est éligible pour les aliments sous signe de qualité dans la loi Egalim. Pour la restauration collective, la loi Egalim a instauré un menu végétarien une fois par semaine. Depuis 1er janvier 2023, les gestionnaires de tous les restaurants collectifs de l’État, de ses établissements publics et des entreprises publiques nationales sont tenus de proposer quotidiennement le choix d’un menu végétarien, dès lors qu’ils proposent habituellement un choix multiple de menus. Cependant, rien ne permet de distinguer la viande et les produits laitiers issus d’animaux nourris à l’herbe ou, avec des céréales et du soja.
Pour une agronomie contribuant aux approches de santé globale
L’agronomie est au cœur des questions relatives au développement de systèmes alimentaires durables. En complément des approches classiques pour réduire les impacts à l’échelle de la parcelle ou de l’exploitation, il importe que les agronomes participent aux recherches inter et transdisciplinaires conduites aux échelles du territoire et du système alimentaire visant à répondre aux enjeux de durabilité de ces systèmes.
Au sein de ces travaux concernant différentes échelles, les agronomes ont des compétences à mobiliser pour co-construire avec les disciplines ad hoc et les acteurs (Papy et al., 2022) :
- des scénarios (à l’échelle de région ou de l’Europe), prenant en compte un ensemble d’enjeux interdépendants, notamment en proposant d’évaluer des leviers pouvant répondre à plusieurs enjeux (rotation, diversité des cultures à différentes échelles, enherbement des cultures pérennes) et en mobilisant les connaissances agronomiques pour évaluer la diversité de leurs effets ;
- des outils pour décliner des stratégies dans des contextes spécifiques de sol et de climat : association cultures et élevages ; choix des plantes de couverture…, considérant des attendus sur les émissions de gaz à effet de serre, la séquestration de carbone, les émissions d’azote et autres polluants, la biodiversité…
- des indicateurs de monitoring prenant en compte la spécificité des contextes pour évaluer les effet des stratégies
[1] Les limites planétaires correspondent à une zone d’incertitude, située à un certain seuil, au-delà duquel on ne peut plus prévoir les conséquences de nos actes et l’évolution de la planète Terre.
[3] Environ 550 captages ont été fermés en France entre 2000 et 2018 du fait de non potabilité de l’eau à cause d’une teneur excessive en nitrates. www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/revision_programme_action_national_ntirates_PAN.pdf
[4] https://www.eea.europa.eu/ims/greenhouse-gas-emissions-from-agriculture quantité N20= 140/273=0,51Mt N2O dont 2/3 d’azote (1/3 d’oxygène), soit 0,3 Mt d’azote pour l’UE
[5] Cette définition est différente calcul de l’efficience calculée par les agronomes, à savoir le supplément de rendement par unité de N apportée qui mesure la réponse des cultures à l'apport de N.
[6] ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php
[8] https://www.eea.europa.eu/ims/nutrients-in-freshwater-in-europe
Remerciements
Nous remercions Elise Pelzer et Gilles Lemaire pour leurs suggestions constructives.
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